Quelles sont les sources de la croissance économique ?

Quelles sont les sources de la croissance économique ?

18 mars 2019 0 Par Amine Nasrallah

LA CROISSANCE ECONOMIQUE ET SA MESURE

QU’EST-CE QUE LA CROISSANCE ECONOMIQUE ?

Selon l’économiste français François Perroux (1903-1987), la croissance économiquecorrespond à « l’augmentation soutenue pendant une ou plusieurs périodes longues d’un indicateur de dimension, pour une nation, le produit global net en termes réels ».

On peut alors définir la croissance économique comme l’augmentation soutenue de la production de biens et services d’un pays sur une période longue.

A court terme, on parle plutôt d’expansion : augmentation de la production de biens et services sur une période courte.

La croissance économique est donc un phénomène quantitatif, à ne pas confondre avec le développement qui est, quant à lui, un phénomène qualitatif qui recouvre l’ensemble des transformations de l’environnement social nécessaires à la croissance. François Perroux définit le développement comme « la combinaison des changements mentaux et sociaux d’une population qui la rend apte à faire croître, cumulativement et durablement, son produit réel global ».

Ainsi la croissance économique est, pour un pays, un enjeu de première importance car c’est elle qui conditionne l’amélioration du niveau de vie de ses habitants. Elle représente dès lors l’objectif principal de la politique économique des pouvoirs publics.

LE PIB COMME MESURE DE L’ACTIVITE ECONOMIQUE

  • Intérêts du PIB comme mesure

La mesure de la croissance économique se fait à travers le taux de croissance du Produit Intérieur Brut (PIB) à prix constants, calculé par année. Cet agrégat comporte deux sous-ensembles : le PIB marchand (qui correspond à la somme des valeurs ajoutées de toutes les unités de production résidentes sur le territoire national en un an) et le PIB non marchand (qui correspond à la valeur de la production non marchande, c’est-à-dire disponible gratuitement ou quasi-gratuitement c’est-à-dire à un prix inférieur à son coût de production, ce qui recouvre essentiellement les biens et services produits par les administrations publiques et privées mais qui ne font pas l’objet d’un échange sur le marché).

A partir du PIB global, on peut calculer le PIB par habitant en le rapportant à l’effectif total de la population du pays (PIB/Population Totale). Le PIB par habitant nous fournit alors une évaluation assez grossière du niveau de développement du pays.

  • Limites du PIB

Le PIB présente, cependant, des insuffisances en tant qu’indicateur de niveau de vie et de développement.

Premièrement, son utilisation pose des problèmes au niveau des comparaisons internationales. En effet, pour pouvoir comparer les PIB par habitant de différents pays, il faut d’abord les traduire en une unité monétaire commune. Et l’utilisation des taux de change officiels des monnaies est à bannir car, d’une part, ces parités monétaires sont instables et fluctuent sans cesse ; d’autre part, car elles ne reflètent pas les parités de pouvoir d’achat entre les pays. Cependant, la comparaison à partir de la méthode des parités de pouvoir d’achat permet de contourner cette difficulté.

Deuxièmement, le PIB reste un indicateur imparfait du niveau de richesse d’un pays du fait des approximations concernant la valeur de certains biens ou services, notamment les services non marchand qui, n’ayant pas de prix sur un marché, sont simplement évalués à leurs coûts de production. De plus, une partie de la production n’est pas prise en compte. En effet les activités non rémunérés (comme le bénévolat, le travail domestique, l’autoconsommation, l’entraide…) ne font pas l’objet d’une évaluation comptable. L’économie souterraine qui comprend essentiellement les activités légales non déclarées (travail au noir) et les activités illégales (les trafics) échappe également à la comptabilisation. (en 2008, l’économie souterraine était estimée à 5,9% des emplois en France et à 26,9% en Grèce).

Enfin, le PIB va inclure, dans son calcul, ce qu’on appelle les activités de « réparation » de dégâts économiques et sociaux qui accompagnent l’activité économique (exemples : crimes et délits, accidents de la route, pollutions, drogue, alcoolisme…). Il ne prend pas en compte aussi la perte de richesse collective que constituent, à long terme, l’épuisement des ressources naturelles et les atteintes irréversibles à l’environnement.

  • Des indicateurs complémentaires

Dès le milieu des années 1970, des économistes ayant pris conscience des insuffisances du PIB, ont proposé des indicateurs complémentaires pour mieux évaluer le niveau de développement des pays, en prenant notamment en compte des éléments quantitatifs variés.

L’Indice de Développement Humain (IDH) est le plus connu. Il a été élaboré par Amartya Sen, prix Nobel d’économie. L’IDH est calculé depuis le début des années 1990 par le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD). Cet indicateur est composé de trois critères : l’espérance de vie à la naissance, le revenu national brut  par habitant en parité de pouvoir d’achat et la durée de la scolarisation. Il se présente sous la forme d’une valeur comprise entre 0 et 1, le niveau de développement étant d’autant plus élevé que l’on se rapproche de 1. En 2011, les pays qui occupaient les premières places du classement étaient la Norvège, l’Australie et les Pays-Bas (0,943 à 0,910), tandis que le Niger et la République Démocratique du Congo étaient aux derniers rangs (0,295 et 0,286).

Cours SES : Quelles sont les sources de la croissance économique ? - Terminale ES

D’autres indicateurs ont également été proposés, certains mettant l’accent sur l’importance de la pauvreté (IPH) ou sur la plus ou moins grande amplitude des inégalités sociales, d’autres visant à intégrer la dimension écologique comme critère d’évaluation de la qualité de la croissance (PIB vert).

LES SOURCES DE LA CROISSANCE ECONOMIQUE

LES FACTEURS DE PRODUCTION

Les deux principaux facteurs de production sont le « travail » et le « capital ». La croissance de la production s’expliquerait en partie grâce à l’accroissement des quantités de facteurs de production utilisées.

Certains économistes ont cherché à mettre en équation (expression mathématique) le lien existant entre les facteurs de production, les input (le travail et le capital), et la production réalisée, l’output. La fonction de Cobb-Douglas (du nom de deux chercheurs américains) se présente alors sous la forme suivante : Y = f (K, L) dans laquelle la production (Y) est fonction des quantités respectives de capital (K) et de travail (L) utilisées par l’appareil de production.

La croissance économique, c’est-à-dire l’augmentation de la production, peut s’expliquer par la hausse des quantités de facteurs de production utilisées mais également par la hausse de la productivité globale des facteurs de production (Production / K + L).

LE PROGRES TECHNIQUE

L’économiste américain Robert Solow en 1956 a montré qu’une partie de la croissance ne s’expliquait pas par l’augmentation des quantités de facteurs de production utilisées (K et L). Il appelle « résidu » cette part inexpliquée de la croissance.

Ce résidu correspond, en réalité, à ce qu’on appelle le « progrès technique », il recouvre tout les éléments qui, à quantités de facteurs inchangés, permettent d’améliorer la productivité globale des facteurs de production (technologies plus efficaces, amélioration de l’organisation du travail, connaissances scientifiques accrues…). On peut définir le Progrès Technique comme l’ensemble des innovations (de produit, de procédé, organisationnelles…) améliorant la productivité globale des facteurs.

LES RESSOURCES NATURELLES

Les ressources naturelles sont également des sources de la croissance économique. En effet, elles sont indispensables pour disposer de matières premières.

Au XVIIIème  siècle, les physiocrates considéraient  déjà la terre comme le principal et l’unique facteur de croissance économique, et il est vrai qu’aujourd’hui encore les ressources naturelles restent vraisemblablement une source importante de croissance économique.

Cependant les ressources naturelles sont bien souvent non renouvelables comme les énergies fossiles par exemple. Et leur maintien dépend fortement de leur utilisation plus ou moins forte.

C’est ce qui a été à l’origine des analyses des dangers de la croissance sur les ressources naturelles. Ainsi dès 1972, le célèbre Club de Rome a prôné l’objectif de croissance zéro.

Ce point nous renvoie aux interrogations concernant la croissance économique et une éventuelle compatibilité avec le développement durable. Peut-on atteindre un niveau de croissance économique convenable tout en préservant l’environnement, c’est-à-dire tout en répondant aux besoins actuels des individus sans compromettre les générations futures à répondre aux leurs ?

Cette problématique est analysé dans le thème 3 d’économie (La croissance économique est-elle compatible avec la préservation de l’environnement ?)

LE CADRE INSTITUTIONNEL

Pour que l’activité économique se développe au mieux, il est nécessaire qu’elle se situe dans un cadre institutionnel favorable. Ce cadre institutionnel va comprendre des administrations publiques compétentes et de qualité, le respect et la protection de droits juridiques tels que les droits de propriété (exemple : la mise en place de brevets protège la propriété des agents sur les marchés et constitue donc une condition favorable au déroulement des transactions économiques sur les marchés). L’intégrité du système politique, c’est-à-dire des gouvernements, est également une condition favorable à la croissance économique. En effet dans les pays qui sont instables politiquement (par exemple les pays en guerre ou les pays gangrénés par la corruption), l’environnement institutionnel est défavorable à la croissance économique.

C’est l’historien Douglas North qui a mis en avant l’importance du cadre institutionnel dans le processus de croissance économique.

LA DIVERSITE DES TAUX DE CROISSANCE ECONOMIQUE

CROISSANCE EXTENSIVE OU CROISSANCE INTENSIVE

Lorsque la croissance économique résulte de l’utilisation d’une plus grande quantité de facteurs de production (travail et capital), on parle de croissance extensive.

La croissance intensive résulte, quant à elle, de l’augmentation de la productivité des facteurs de production. Ces derniers peuvent être plus productifs, autrement dit plus efficaces, grâce à une hausse de la valeur ajoutée par salarié, grâce au progrès technique (exemple : automatisation des machines), ou à une meilleure organisation du travail (exemple : le taylorisme).

LA DIVERSITE DES TAUX DE CROISSANCE SELON LES NATIONS

Selon les nations, les taux de croissance différent. Ainsi des écarts plus ou moins importants peuvent exister entre des nations.

L’économiste américain W.W. Rostow (1916-2003) explique dans son ouvrage « les étapes de la croissance économique » durant les années soixante que chaque pays passe par une série d’étapes similaires dans leur développement économique. Et les écarts de croissance économique entre les nations dépendent uniquement du moment où s’effectue le décollage économique (take-off), il ne s’agirait alors que d’une question de temps.

Rostow décrit alors cinq étapes de la croissance économique :

→ La société traditionnelle dans laquelle la croissance est quasiment absente du fait de l’absence d’objectifs de développement, de changement et de production. L’activité principale dans ce type de société est l’agriculture (environ 75% des occupations de la population active).

→ Les conditions préalables au décollage économique : cette étape se caractérise par l’apparition de la croissance économique grâce à des changements structurels notamment dans le secteur agricole où les gains de productivité s’élèvent. De profondes mutations sont également observées dans le secteur des transports et dans le commerce extérieur.

→ Le décollage économique ou « take-off » : il s’agit de l’étape décisive. C’est le moment où la croissance économique devient un phénomène auto-entretenu. Le décollage économique est entrainé grâce à trois conditions essentielles : la forte hausse du taux d’investissement productif, la mise en place d’institutions politiques et sociales favorables à l’expansion économique et enfin le développement de secteurs moteurs dans l’industrie (exemple : l’industrie du textile).

« Le décollage est la période pendant laquelle la société finit par renverser les obstacles et les barrages qui s’opposaient à sa croissance régulière. Les facteurs de progrès économique, qui jusqu’ici n’ont agi que sporadiquement et avec une efficacité restreinte, élargissent leur action et en viennent à dominer la société. La croissance devient la fonction normale de l’économie. Les intérêts composés s’intègrent dans les coutumes et dans la structure même des institutions ».

→ La maturité : durant cette étape, la production se développe et donc le taux de  croissance économique continue d’augmenter. La croissance gagne alors l’ensemble des secteurs économiques.

→ L’ère de la consommation de masse : durant cette dernière étape, la production continue mais vient s’ajouter alors la consommation de masse qui se développe et dépasse les besoins alimentaires. Rostow explique que durant cette dernière étape, « La production de biens de consommation durables et les services deviennent progressivement les principaux secteurs de l’économie ».

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